Marrakech "El amara" - "la rouge" - est longtemps restée la rivale sudiste de Fez en tant que capitale impériale. Elle s'étend sur une vaste plaine encerclée par sept kilomètres de murailles rose-rouge en "tabiya",mélange de sable rose local et de chaux.
Les remparts furent érigés en 1126/27, pour remplacer la barrière de ronces qui protégeait le premier campement. Les premiers sujets almoravides incluaient des tribus de l'Atlas, des nomades du Sahara, diverses peuplades africaines et maghrébines vaincues et converties, et d'anciens esclaves ...
De fait Marrakech est plus africaine que toutes les grandes cités du nord du Maroc, comme l'observait Edith Wharton en 1927 :"Marrakech est le grand marché du sud; et le sud ne s'arrête pas aux chefs féodaux et à leurs guerriers sauvages de l'Atlas, mais s'étend bien au-delà : aux Touaregs voilés du Sahara, à Dakar, à Tombouctou,au Sénégal et au Soudan".
Le site de la cité ocre-rouge est d'une beauté à couper le souffle avec en toile de fond, l'Atlas, la plus grande chaîne de montagnes du Maroc, dont on aperçoit souvent les sommets enneigés derrière un rideau de brume. Au XVIe siècle, Louis de Marmol la décrivait comme "une ville superbe, la mieux située de l'Afrique, dans une belle plaine...entourée d'un paysage parmi les plus riche..."
De toutes les villes impériales marocaines, Marrakech est sans doute celle dont le nom évoque le plus l'exotisme, le dépaysement et l'enchantement. Ville chargée d'histoire, qu'elle a le plus souvent créée ou façonnée, Marrakech n'est pas à coup sûr une ville quelconque, anodine. Tout y est en effet différent, original, excitant, envoûtant même. Son site d'abord: Située dans une immense plaine gagnée sur le désert grâce à la ténacité des hommes, adossée à la chaîne majestueuse du haut Atlas aux sommets enneigés durant la majeure partie de l'année, Marrakech est avant tout une grande oasis.
Les caravanes, qui jadis assuraient un commerce florissant avec l'Afrique noire, avaient l'habitude d'y faire escale à la recherche d'un repos réparateur avant la grande traversée du Sahara. L'ingéniosité et l'opiniâtreté des hommes ont fini par trouver une solution à la rareté de l'eau. Des khittaras (ou réservoirs) souterrains y emmagasineront l'eau et empêcheront l'évaporation du précieux liquide, qui fait vivre une immense palmeraie protégeant des remparts ocres qui, de leur côté, entourent la "médina ou ville traditionnelle".
Marrakech fut édifiée en 454 de l'Hégire, correspondant à l'an 1062 de l'ère chrétienne, par Youssef Ibn Tachfine qui fonda la dynastie Almoravide, la seconde dynastie marocaine, après le déclin des Idrissides à Fès. Très vite Marrakech, sous l'impulsion des Almoravides, hommes pieux et austères, devint un important centre commercial, culturel et religieux pour l'ensemble du Maghreb, l'Andalousie et une partie de l'Afrique noire. Le fils de Youssef Ibn Tachfine, Ali Ben Youssef, fortifia la ville en dressant des remparts sur plusieurs kilomètres, et, en édifiant des mosquées et des médersas qui subsistent encore de nos jours. L'Espagne musulmane exerça une grande influence sur l'architecture de la ville, et inspira plusieurs de ses artisans et architectes.
La dynastie Almohade, qui succéda aux Almoravides en 1147, entreprit l'agrandissement et l'embellissement de Marrakech. Yacoub AL MANSOUR entreprit la finition de la construction de la mosquée et du minaret de la Koutoubia, un des plus célèbres monuments du monde islamique, et qui est, pour Marrakech, ce qu'est la Tour Eiffel pour Paris, à la fois symbole et référence. La ville connaissait alors sa période de prospérité et de gloire. De nombreux écrivains et poètes venus d'Andalousie et d'ailleurs, attirés par l'intense activité culturelle et artistique, contribuèrent par leurs écrits à son rayonnement.
L'avènement des Mérinides, qui prirent la ville en 1269, eût des conséquences désastreuses sur Marrakech qui se voyait abandonnée par ses savants et artisans et délaissée au profit de Fès, sa rivale de toujours. Cette période s'acheva en 1551, lorsque le Sultan Saâdien, Mohamed El Mahdi, dont la dynastie régnait depuis 1529 sur le Maroc, installa sa capitale à Marrakech qui put ainsi renouer avec ses fastes d'antan. Les Saâdiens, grands bâtisseurs, restaurèrent les monuments tombés en ruines et édifièrent de somptueux palais, notamment le palais "Badi" construit par le Sultan Ahmed El Mansour Ed-Dahbi. Bien que complètement abandonné de nos jours, le "Badi" sert de cadre au célèbre et traditionnel Festival National du Folklore, qui, en juin de chaque année, réunit les meilleures troupes folkloriques du pays. Sous le règne du sultan Ahmed El Mansour Ed-Dahbi, dit le "doré" en raison du commerce de l'or qu'il entretenait avec le Soudan, Marrakech atteint l'apogée de sa gloire. Mais de nouveau, une autre dynastie, l'actuelle dynastie Alaouite, succéda aux Saâdiens et le Sultan Moulay Ismaïl, contemporain de Louis XIV, entreprit la construction d'une nouvelle capitale, Meknès, dont il voulait faire une "Versailles" marocaine.
L'instauration du protectorat français sur le Maroc, en 1912, consacra l'émergence de Rabat comme capitale administrative du pays. Malgré les péripéties de l'histoire, Marrakech a profondément marqué la vie du Maroc des siècles durant, au point que les étrangers appelaient le Maroc, Royaume de Marrakech. Le mot est d'ailleurs une déformation du nom de cette ville impériale.